Goat Girl, belle promesse du rock anglais

Goat Girl, la nouvelle promesse du rock anglais, quatre filles dans le vent. © DR
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Signées par Rough Trade, les quatre Londoniennes de Goat Girl épatent avec un premier album drôle, frais et mordant.

Avec Shame, elles sont un peu les fers de lance de la nouvelle scène londonienne. Sans doute aussi à l’heure actuelle l’une des plus belles promesses du rock anglais. Courtisées par XL, Domino, RCA mais signées depuis environ deux ans sur le label Rough Trade, les quatre filles de Goat Girl sortent enfin leur premier album. Pour passer à Bruxelles en causer, il y a Lottie Pendlebury alias Clottie Cream. Petite brune au visage juvénile qui chante, joue de la guitare et écrit les textes. Il y a aussi la dernière venue, la batteuse Rosy « Bones » Jones, sorte de garçon manqué. Cheveux courts et maillot crasseux de gardien de foot qui aurait joué dans la matinée…

La soeur de Lottie est illustratrice. Sa mère danseuse. Et son père, qui a un quartet de musique minimaliste, bosse dans un conservatoire. « J’ai grandi dans le classique. Un truc de niche. Avant de découvrir par moi-même la pop et le rock. J’ai étudié le violon mais je trouvais ça très ennuyeux d’apprendre tous ces trucs par coeur. Je me suis donc mise à la guitare pour écrire mes propres chansons. »

Histoire somme toute commune de rébellion et d’affirmation de soi, Goat Girl s’assume. Revendique autant l’influence de Sonic Youth, du Gun Club, des Pixies et de Savages que le plaisir procuré par Dizzee Rascal, M.I.A., Santigold, Grimes et Gwen Stefani. « On est toutes d’accord sur le son dissonant et lo-fi… Mais je pense que nos chansons ont aussi quelque chose de poppy. Pour l’instant, les grosses influences pour moi, c’est Broadcast, Stereolab… Des trucs un peu plus électroniques. Le kraut aussi. Can, Beak… »

Si Lottie est curieuse, Rosy a été à bonne école. Son père vient d’ouvrir un magasin de disques. « Il a 57 ans et il s’est lancé là-dedans il y a six mois. Avant, il bossait dans un bureau. Ma mère, elle, rêvait d’être batteuse. Elle est un peu jalouse. » Les filles rigolent. Franches. Spontanées. Pas péteuses pour un sou. Lottie se souvient de son premier groupe. De ses reprises des Beatles et des White Stripes. « Ça devait venir de mon prof de guitare. Il m’a poussée vers des gens. Puis m’a recommandé d’en trouver d’autres moi-même. C’est ce que j’ai fait. J’ai rencontré des personnes dans le même état d’esprit que moi. Des personnes qui voulaient créer. On a fait la connaissance de Rosy plus tard via le Windmill à Brixton. C’est dur de trouver des batteurs aujourd’hui… »

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À la fois pub et salle de concerts, le Windmill est l’épicentre de la jeune scène sud-londonienne. Goat Girl en a fait son QG. Rosy travaille même à la porte… « On allait y voir beaucoup de concerts à l’époque. Meatraffle, Warmduscher, Bat-Bike… On était vraiment dans cet environnement Trashmouth Records. Ça nous a inspirées. Les scènes ouvertes ont joué un rôle déterminant aussi. Nous motivant à avoir une nouvelle chanson chaque semaine. »

Il y a par moments chez Goat Girl un côté The Coral au féminin. Les filles refusent de parler d’influence mais reconnaissent l’évidente ressemblance. « D’office, il y a ces lignes de basse. Mais ce n’est pas du tout intentionnel. On n’a réalisé que très tard. Même si c’est particulièrement flagrant sur un titre comme Cracker Drool . J’aime bien mais ce n’est aucunement une source d’inspiration. Il s’agit de chansons qui passent à la radio quand tu grandis et finissent par jouer un rôle quelque part à l’intérieur de ta tête. »

Satiristes et ciné indé

Pour mettre en boîte Goat Girl, ce premier disque tant attendu, les Londoniennes ont embauché Dan Carey. Producteur croisé au chevet de Kylie Minogue, Franz Ferdinand, Hot Chip, Emiliana Torrini ou encore Kate Tempest… « Sachant là où on voulait aller, on s’était toujours imaginé dire à un producteur ce qu’il devait faire. Notre musique avait toujours sonné comme en live. Sans s’engager vers les possibilités que te permet le studio. Là, on a trouvé quelqu’un qui avait un son. Dan Carey a bossé avec plein d’artistes différents. Bat For Lashes, M.I.A. Des trucs très poppy et d’autres pas du tout. Mais tu pouvais presque entendre sa griffe sur tout ce qu’il faisait. On aimait ce son électronique expérimental éloigné du nôtre. Travailler avec quelqu’un comme lui, c’était s’ouvrir à un nouveau contexte. À l’expérimentation… »

Sur ces 19 pistes, partagées entre vraies chansons et interludes, se sont glissés du violon, un mellotron, un swarmatron et des boîtes à musique bizarres… « Travailler de la sorte a ouvert pas mal de portes. On n’a jamais voulu se limiter à être un groupe à guitares. C’est un album plus qu’une collection de 45 Tours. On cherchait une certaine cohésion entre les chansons et on s’est dit que les interludes étaient un bon moyen d’y arriver. On s’est laissé aller à improviser un soir bourrées avec les machines à fumée allumées. »

Goat Girl, belle promesse du rock anglais

L’écriture est incisive. Le tempérament bien présent. Goat Girl épingle le harcèlement dans les transports en commun (Creep). Appelle à faire cramer dans un feu de joie les Tories et les ultra-conservateurs nord-irlandais du D.U.P. (Burn the Stake). Les filles s’emballent sur le cinéma de Lars von Trier, Gaspar Noé, Harmony Korine, Jim Jarmusch et Richard Linklater. La musique de la série Utopia par Cristobal Tapia de Veer. L’énergie live de la Fat White Family ou encore l’écriture de Ben Wallers, du groupe Country Teasers. « Il traite de racisme et d’homophobie en incarnant des gens intolérants. Ça pourrait porter à controverse. Mais il arrive à rendre les situations tellement ridicules… J’aime beaucoup les auteurs satiriques comme Bill Hicks (le nom du groupe est inspiré par un de ses sketchs, NDLR) ou Stewart Lee. Rire tout en commentant ce qui se passe autour de nous. Je pense qu’il y a de ça dans nos chansons. » Lottie et Rosy évoquent encore leur manager, qui bossait avant pour Palma Violets. Puis surtout la pochette arty et colorée de leur pote Miguel Casarrubios, qui leur rappelle le genre abstrait de Daniel Richter et renvoie au son du disque. Et dire qu’elles ont à peine 20 ans…

Goat Girl, distribué par Rough Trade/ Konkurrent. ****

Le 15/05 à l’Ancienne Belgique.

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