Fitz Roy, une affaire de famille

© Léonor Malamatenios
Kevin Dochain
Kevin Dochain Journaliste focusvif.be

Fitz Roy, rejeton bruxellois du grunge et du stoner, présentera un premier album décomplexé le 31 octobre prochain au Botanique. On a rencontré François Chandelle, moitié de la fratrie à la tête d’un groupe qui compte bien en découdre.

Faut-il absolument être original pour se démarquer? N’est-ce pas un peu vain de jouer du rock à guitares en 2018? Ou plutôt: pourquoi se sent-on obligé de poser la question quand on est face à un groupe qui, effectivement, ne fait « que » touiller dans les vieilles marmites punk, grunge et stoner? À l’écoute du premier album des Bruxellois de Fitz Roy, Drops, on a juste envie d’envoyer toutes ces considérations valser: fuck it, c’est bon, ça envoie du lourd et surtout, il n’y a pas une once de pose là derrière. « Le grunge, j’ai grandi avec. Mon frère a aussi parce que j’en écoutais à plein pot chez moi », explique François Chandelle, chanteur-guitariste du groupe qu’on rencontre, un sandwich à la main, face à une mare qui donne presque à cette interview des airs de psychothérapie.

Comment ça s’articule entre deux frères dans un même groupe?

On est trois frères chez les Chandelle. Celui du milieu, on l’aime à la folie, mais on ne travaillera probablement jamais ensemble. Entre Édouard et moi, il y a 9 ans de différence. Ça aide énormément à ce que les ardeurs et les coups de gueule restent cool. On s’écoute l’un l’autre parce qu’on est de générations complètement différentes. On a du respect absolu pour ce que fait l’autre. On travaille tous les deux dans l’audiovisuel et on a la même passion musicale, les mêmes références… Bien sûr, il y a parfois des coups de gueule, mais comme c’est celui qui a le plus de poids qui gagne et que je pèse 103 kilos, il ferme sa gueule (rires).

Fitz Roy est ton premier « vrai » groupe alors que tu approches les 35 ans. Comment t’es-tu remis à la musique après tant d’années sans?

Après les études, j’ai beaucoup voyagé, notamment en Amérique latine où j’ai rencontré ma femme. J’ai aussi tourné un documentaire en Uruguay. À mon retour, il y a 8 ans, je me suis remis à faire de la musique en faisant du cinéma qui parle de musique. J’ai réalisé un court métrage, Acouphènes, sur lequel j’ai eu la chance de travailler avec Elli Medeiros. À la fin du tournage, j’ai eu une espèce de flash « faut que je compose de la musique ».

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Dans le clip d’Animal, on retrouve l’acteur Anton Kouzemin avec lequel François Chandelle avait déjà travaillé sur Acouphènes.

Pourquoi encore faire du rock à guitares en 2018?

On sait bien que ça fonctionne par cycles. Que le rap a eu son heure de gloire en Belgique avec Benny B (rires). Puis Ghinzu et dEUS sont apparus dans la foulée. Peut-être même que les cycles s’accélèrent, mais le rock ne disparait pas. Il perd de l’espace, mais on voit bien qu’il y a un revival du rock, du grunge, niveau vestimentaire, niveau pop culture. Il y a toute une scène alternative, math rock, qui est hyper développée: le rock est loin d’être mort même s’il n’est plus mainstream.

Tes références absolues?

À 18 ans, je me suis fait tatouer le logo d’A Perfect Circle dans le dos. Pour moi, c’est la référence absolue, du moins leur premier album. C’était la Mecque. Il y avait tous les éléments que j’attendais dans le rock qui étaient rassemblés. Tant au niveau des textes que de la musique, des ambiances, le batteur était monstre… Après, ils se sont un peu dilatés, même si ce que continue à faire le chanteur dans des groupes comme Puscifer et autres, c’est une tuerie totale. Sinon, à part A Perfect Circle, du bon vieux punk mélodique à la sauce Nirvana -c’est un groupe fabuleux. Quand on me dit que ma voix sonne comme la sienne, je prends ça comme un compliment.

Et aujourd’hui, c’est quoi les groupes qui t’inspirent?

Aujourd’hui, pour moi, la grosse claque, c’est Kapitan Korsakov et Raketkanon. Il y a des couilles, il y a du nouveau, il y a du frais, et il y a de l’ancien qui est là quand même, en trame bien grasse. Dans le même groupe de potes flamands, il y a Brutus que j’aime beaucoup. Il y a une énergie en live que j’adore. Electric Noise Machine, aussi, Victoria + Jean… Je parle beaucoup de Belges, mais c’est parce que j’écoute beaucoup de Belges pour l’instant.

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De quoi parlent les textes de Fitz Roy?

Les morceaux naissent toujours en yaourt, dans lequel des bribes de texte se forment. Autour de ces textes, j’écris le « reste »: ça parle beaucoup de choses qui font mon actualité. De paternité, d’amours foireuses, du fait qu’on perde un batteur… Mais c’est transposé de manière assez abstraite, et une personne qui lit nos textes ne va pas forcément savoir que je parle de notre batteur qui s’est barré et que je trouve ça triste. Ça pourrait être l’histoire d’un couple, d’un pote…

Quand est-ce qu’on sait qu’on a écrit une bonne chanson?

J’enregistre tout dans mon salon avec ma petite carte son ou mon iPhone. Forcément, ma fille de six ans entend tout ça. Et quand elle le fredonne derrière, c’est que c’est bien (rires). Ma fille fredonne du Slayer (il chantonne Raining Blood avec une voix fluette, NdlR)! Je ne sais pas si ça me rend très viril, grunge, d’expliquer ça, mais…

…Depuis le docu Some Kind of Monster, on a le droit d’avoir l’air de n’importe quoi! (rires)

Exactement. J’ai un processus complètement débile pour écrire. J’ai toujours mon téléphone en poche et je m’enregistre tout le temps mes idées. Que je sois dans le tram, quand je marche dans la rue, quand je suis dans ma bagnole… J’enregistre d’abord une espèce de mélodie qui serait dans ma tête, je tape sur mon volant… Et quand je rentre le soir, je mets les trucs dans mon ordi, j’enregistre des idées de batterie. Les chansons naissent souvent de trucs qui sont sur mon iPhone.

Donc c’est du non-stop, pas besoin d’être dans une sorte d’endroit mental confortable?

Non. Quand je m’assieds et que je me dis « je vais écrire », il n’y a rien qui vient. Marcher, c’est là qu’il y a le plus de choses qui viennent. Je marche, et dans mes enregistrements, tu m’entends faire des trucs, tu entends les gens qui passent… C’est des trucs qui me trottent en tête: c’est bizarre, mais ça marche bien.

Fitz Roy, Drops, autoproduction. ***(*)

En concert le 31/10 au Botanique, avec Seno Nudo en première partie.

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