Les musts de la rentrée BD

Laurent Raphaël
Laurent Raphaël Rédacteur en chef Focus

La rentrée sera riche (qui a dit saturée?), et ce dans tous ses compartiments de jeu. On fait le point.

Le Signe des rêves

De Naoki Urasawa, Éditions Futuropolis.

Sorti le 23/08.

Les musts de la rentrée BD

C’est au tour de Naoki Urasawa (l’auteur star entre autres des mangas Monster et 20th Century Boys) de revisiter les salles du Louvre dans la collection des éditions Futuropolis dédiée au célèbre musée. M. Kamoda, abandonné par sa femme et criblé de dettes, se retrouve avec sa fille à Paris après avoir croisé sur sa route un « signe des rêves ». Il y sera question de manipulations, d’un personnage mystérieux et d’une quête désespérée autour de La Dentellière de Vermeer. C.B.

Charlotte Impératrice

De Matthieu Bonhomme et Fabien Nury, Éditions Dargaud.

Sorti le 24/08.

Les musts de la rentrée BD

Quelle bonne idée a eu là Fabien Nury (Tyler Cross, Il était une fois en France, Katanga…) de faire de la vie tragique et rocambolesque de Charlotte de Belgique, fille de Léopold Ier devenue brièvement Impératrice du Mexique avant de mourir folle et recluse à 86 ans, une mini-série qu’il a confiée à Matthieu Bonhomme: le semi-réalisme flamboyant du dessinateur de Messire Guillaume, Texas Cowboys et Esteban est à la hauteur de la saga qu’ils racontent et que le Visconti du Guépard aurait adorée. O.V.V.

Pauvre Sydney!

De Charles Forsman, Éditions L’Employé du Moi.

Sorti le 24/08.

Les musts de la rentrée BD

La diffusion de l’adaptation de The End of the Fucking World sur Netflix a peut-être changé la vie du dessinateur américain Charles Forsman, elle n’a pas encore influencé le contenu de ses comics indés, ni la fidélité à L’Employé du Moi pour les découvrir en français. Dans Pauvre Sydney!, récit intime et parfois fantastique d’une ado mal dans sa peau, on retrouve son goût pour les misfits et les freaks des banlieues US, dépressifs mais loin d’être déprimants. O.V.V.

Les Rigoles

De Brecht Evens, Éditions Actes Sud.

Sorti le 29/08.

Les musts de la rentrée BD

En à peine trois albums (Les Noceurs, Les Amateurs et Panthère), le Gantois Brecht Evens s’est imposé comme le nouveau prodige de la BD européenne. Une réputation flatteuse assise sur un style flamboyant, baroque et poétique, sorte de spectacle pyrotechnique permanent capturant aussi bien Picasso, Chagall qu’Ensor dans son shaker d’aquarelles. Ces ingrédients tapissent Les Rigoles, dont l’arc narratif -le récit mosaïque d’une nuit de folie dans une grande ville- rappelle Les Noceurs, et les échappées récurrentes vers le fantastique la tonalité onirique de Panthère. Pavé de fulgurances graphiques tantôt intimistes, tantôt luxuriantes, l’histoire entrelace les trajectoires d’une poignée de personnages que la nuit engloutit. La géographie cinétique s’articule autour de quelques ports d’attache où se croisent ces destins: un restaurant branché et surtout le Disco Harem, boîte de nuit et temple arty de ce Pigalle impressionniste. Une fresque endiablée qui ne serait qu’un exercice de style virtuose si Evens n’ajoutait à sa vision une piquante et souvent hilarante observation des moeurs contemporaines, dialogues déjantés à l’appui. La nuit agit comme un accélérateur de particules, révélant les failles et les désirs. Comme chez Rodolphe, alias Baron Samedi, qui entame son marathon nocturne au creux de la vague et renaît en prince de la fête insatiable. Chaque planche explose à la figure ou au contraire aspire tout entier le regard, au rythme des pulsations frénétiques de cette jungle urbaine. Du grand art. L.R.

À travers

De Tom Haugomat, Éditions Thierry Magnier.

Sortie prévue le 05/09.

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Sans un mot, si ce n’est la mention discrète de la date et du lieu de chaque scène en bas de page, le Français Tom Haugomat réussit l’impossible: raconter la vie d’un homme de sa naissance à sa mort. Tout y passe: l’enfance heureuse en Alaska, les rêves d’étoiles, la maladie de la mère, la carrière à la Nasa, la paternité, le divorce, la dépression, la vieillesse. C’est dire la force poétique et cinématographique de ses images, bijoux graphiques sculptés dans des tons pâles charriant une infinie mélancolie. Un album bouleversant. L.R.

Le Chemisier

De Bastien Vivès, Éditions Casterman.

Sortie prévue le 12/09.

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Rentrée chargée pour le surdoué et surproductif Bastien Vivès: outre un avant-dernier épisode de la saga Lastman attendu avant la fin de l’année, le Français sort coup sur coup deux albums qui tiendront, comme à son habitude, et de l’art et du cochon, mais en des proportions variées. Dans Le Chemisier, chez Casterman, où un bout de tissu va transformer une fille banale et invisible, telle La Moustache d’Emmanuel Carrère, on retrouve le Vivès sensuel sous influence Claude Sautet. Dans Petit Paul par contre, qui ouvre une nouvelle collection « Porn’Pop » chez Glénat, c’est le sale gosse priapique et obsédé adepte de la BD porno et provoc’ qui se laisse aller avec ce récit qui fait suite aux Melons de la colère (paru chez BDCUL) et effectivement très charnu. O.V.V.

Soirée d’un faune

De Florent Ruppert et Jérôme Mulot, éditions L’Association.

Sortie prévue le 12/09.

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Retour aux recherches formelles pour le duo intello-rigolo Ruppert et Mulot: c’est sous la forme d’une carte routière que se lit et s’apprécie leur dernier opus, soit une suite en images à L’Après-midi d’un faune de Debussy, lui-même d’abord inspiré d’un poème de Mallarmé. Soit ici, 110 danseurs et danseuses pour remplacer leurs 110 mesures et 110 alexandrins, disséminés dans une soirée décadente et contemporaine qui se lit par séquences au dépliage, ou tel un grand poster narratif une fois cette Soirée dépliée. O.V.V.

Sabrina

De Nick Drnaso, Éditions Presque lune.

Sortie prévue le 13/09.

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Nick Drnaso nous avait percuté avec son Beverly, sorti l’année passée et récompensé du Fauve révélation à Angoulême 2018. Le voilà de retour avec Sabrina, une sombre histoire d’enlèvement. Teddy se réfugie, après la disparition de Sabrina, sa petite amie, chez son ami Calvin, technicien informatique dans l’armée. Leurs vies basculent lorsqu’une vidéo du meurtre de la jeune fille fait son apparition sur les réseaux sociaux et devient virale. L’auteur américain poursuit sa réflexion sur la jeunesse et plus particulièrement sur l’hyperconnexion du monde. Troll, fake news et théories du complot sont au menu de cette deuxième histoire du petit génie nominé au fameux Man Booker Prize, prestigieux prix littéraire anglo-saxon, une première pour une bande dessinée! C.B.

Les Grands Espaces

De Catherine Meurisse, Éditions Dargaud.

Sortie prévue le 21/09.

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Depuis qu’elle a été confrontée à la laideur la plus totale (les attentats de Charlie Hebdo en janvier 2015), Catherine Meurisse cherche inlassablement le beau. Après La Légèreté, voilà donc Les Grands Espaces, où l’auteure revient à son enfance, à la campagne et à la nature, plus libre que jamais. O.V.V.

L’Arabe du Futur 4

De Riad Sattouf, Éditions Allary.

Sortie prévue le 27/09.

Les musts de la rentrée BD

Suite et peut-être apogée du « roman autobiographique » qui a fait de Riad Sattouf une star internationale: le quatrième opus de son Arabe du Futur est enfin annoncé et couvrira les années 1987-1992, quand le petit Riad, tiraillé entre sa mère bretonne et son père syrien, devient adolescent… Un volume de 288 pages où se côtoieront donc rire et drame (son père se radicalise, jusqu’au coup d’État), petite et grande Histoire. O.V.V.

Mais aussi…

Moi, ce que j'aime, c'est les monstres
Moi, ce que j’aime, c’est les monstres

La rentrée sera riche (qui a dit saturée?), et ce dans tous ses compartiments de jeu. Le roman graphique avec de belles choses très attendues: l’événement Emil Ferris et son Moi, ce que j’aime, c’est les monstres chez Toussaint Louverture, le Malaterre de Pierre-Henry Gomont chez Dargaud, les derniers opus de Tofépi ou Lumineau à L’Association, Cyril Pedrosa et son Âge d’Or chez Dupuis, l’étrange Sherlock Frankenstein que nous promet Jeff Lemire chez Urban, le retour de Luz chez Futuro… Même embouteillage prometteur au niveau des suites ou fins de (mini-)séries: le troisième et sans doute dernier Moi, René Tardi, un quatrième Supermurgeman du désormais cinéaste Mathieu Sapin, un huitième Chat du Rabbin de Sfar, un Moi, fou qui semble faire suite à Moi, Assassin du duo Altarriba-Keko chez Denoël Graphic. Et on rajoute à ça la catégorie des « héros par… » et reprises, toujours en forme: Spirou ou l’espoir malgré tout d’Émile Bravo, un Alix écrit par David B., un 25e Blake et Mortimer au dessin confié au duo Teun Berserik-Peter Van Dongen, l’ultime XIII Mystery signé Van Hamme et Grenson, mais surtout, enfin, le Tif et Tondu de Blutch et le Blueberry de Blain! Et on ne cite ici que les plus attendus (avec le retour des Nombrils de Delaf et Dubuc, pour les plus jeunes, en novembre). O.V.V.

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