Critique | Livres

[La BD de la semaine] Rose, de Vernay, Lapière et Alibert

Valérie Vernay © Chloé Vollmer-Lo
Olivier Van Vaerenbergh
Olivier Van Vaerenbergh Journaliste livres & BD

MINI-SÉRIE | Entre émotion, mystère et fantastique, féminine et co-écrite par une scénariste de télé: Rose incarne à elle seule les tendances actuelles des BD tous publics.

Rose est un joli prénom, mais qui ne traduit pas bien les humeurs taciturnes de celle qui le porte: Rose, jeune fille discrète, solitaire et surveillante de musée, paraît souvent absente, assise de longues minutes sans bouger sur sa chaise, les yeux dans le vide, sans rien dire ni répondre, et pour cause; Rose, effectivement, dans ces moments-là, n’est plus tout à fait là. Si son corps ne bouge pas, son esprit, lui, prend la poudre d’escampette et va soudain voir ailleurs, dans les appartements d’inconnus ou dans les conversations des amis, se confronter au bonheur simple des autres ou subir les avis tranchés la concernant… Une tare et une maladie plus qu’un don qui vont pourtant, enfin, s’avérer utiles, dans le quotidien triste de Rose, devenu tragique: son père, détective privé, a été assassiné. Un fait divers épouvantable et bientôt très étrange: non seulement la scène du crime ressemble furieusement à une des toiles accrochées au musée, mais l’esprit de Rose fait également la connaissance de trois fantômes qui en savent long sur son histoire familiale et peut-être ce meurtre. Un meurtre dont les racines pourraient remonter à… plus de 500 ans en arrière. Intrigués? Alors foncez sur Rose, mais sans trop y prendre goût: il n’y en aura que pour trois albums.

Effets émotionnels plus que spéciaux

[La BD de la semaine] Rose, de Vernay, Lapière et Alibert

La première envie de Denis Lapière, scénariste maison des éditions Dupuis depuis des décennies, était double: écrire l’histoire d’une jeune fille qui doit enquêter sur la mort de son père et travailler avec Valérie Vernay, dessinatrice, entre autres, du superbe double album La Mémoire de l’eau, déjà chez Dupuis. Un double album remarquable et remarqué réalisé en tandem avec son compagnon Mathieu Reynès, lui-même auteur de la série Harmony, elle aussi fantastique, tous publics et moderne. C’est d’ailleurs lui qui a injecté dans le projet l’idée du dédoublement –« qui me convenait vraiment bien, nous précisait Denis Lapière au dernier festival d’Angoulême. Je faisais déjà du fantastique il y a 20 ans avec Charly. » Mais c’est bien Denis qui a convié Émilie Alibert dans l’aventure. Une première pour elle, surtout active en télévision: elle est directrice d’écriture sur la série Plus belle la vie. Une expérience qui se ressent ici dans les dialogues et l’émotion que le trio tient à faire passer, plus que dans la nature fantastique de leur trame –« Nous voulions vraiment que les dédoublements de Rose soient vus comme des effets émotionnels, pas comme des effets spéciaux. » Faudrait-il dès lors lire Rose comme la première pierre d’un édifice qui pourrait, par exemple, s’exporter en télé? Les auteurs réfutent: ils savent mieux que personne qu’il faudrait à la fois un très gros succès, puis un très gros budget. Et surtout une caméra aussi douce et agréable que les dessins de Vernay -et ça non plus, c’est pas gagné.

ROSE (TOME 1/3), DE VALÉRIE VERNAY, DENIS LAPIÈRE ET ÉMILIE ALIBERT, ÉDITIONS DUPUIS, 48 PAGES. ***(*)

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