Critique scène: Un conte surgi d’un glaçon

© Simon Breveeld
Estelle Spoto
Estelle Spoto Journaliste

Le cadre intime du Boson accueille une fable écologique venue du Grand Nord. Avec Blizzard, Une Tribu Collectif signe une petite perle de théâtre jeune public, à la fois technique et mythique.

Il fait froid? Attendez de vous retrouver dans les vents glacés de la dernière création d’Une Tribu Collectif, dont on avait beaucoup apprécié le spectacle précédent, La Course. Destiné à tous à partir de 7 ans, ce Blizzard convoque lui aussi des marionnettes « de chiffon » manipulées à plusieurs, pour un effet troublant de réalisme dans les mouvements et les postures.

Ça commence dans un brouillard, les projecteurs tournés vers la salle aveuglant partiellement le public. Alors que retentissent au fond du plateau les notes tenues d’une vielle à roue, deux oiseaux s’approchent en plein vol, avant que la lumière ne laisse apparaître une femme et deux hommes, coiffés de fourrure et portant un pantalon de cette même matière. La femme s’adresse à nous en russe, avant d’être traduite en français par son comparse. « Nous, on vient de tout là-haut. » « Chez nous, quand il fait vraiment trop froid, on dit qu’il faut danser. »

Déclenchant grue et table élévatrice comme des chefs de chantier, ces trois personnages vont fixer en hauteur un support souple recouvert de sable noir pour raconter l’histoire de leur ancêtre. Un ancêtre né dans un glaçon et qui rencontrera un esprit de la nature terrifiant, le Kimik, ours aux dents de sabre et à la longue queue. Ce récit des origines s’inspire de différents contes de la culture inuit, ce peuple autochtone vivant « tout au Nord » du continent américain. La bande sonore du spectacle comprend d’ailleurs plusieurs chants de gorge, le chant diphonique pratiqué en duo par les femmes inuit et dont les sons étranges ajoutent au surnaturel des situations.

La fable de Blizzard retrace une provocation initiale, un combat, une perte, une revanche puis une réconciliation. Elle donne au final une voie à suivre pour l’homme qui s’est accaparé toutes les ressources naturelles au détriment des autres créatures. « Notre ancêtre a alors décidé de vivre en harmonie avec le Kimik ». Etrange et poétique, rude et doux en même temps, Blizzard a décroché le Prix de la Ministre de la Culture lors de sa création cet été aux Rencontres de Théâtre Jeune Public de Huy. Il l’a bien mérité.

Blizzard (à partir de 7 ans): jusqu’au 31 janvier au Boson à Bruxelles, www.leboson.be

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