Micro Festival: une réussite de taille

© Micro Festival
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Entre bières bios, forêt de brumisateurs et boîte de nuit rikiki, les Limiñanas, The Notwist et Snapped Ankles ont secoué le 9e Micro Festival, toujours à taille humaine. Downsizing…

« En raison de la construction d’un bâtiment sur le site de l’Espace 251 Nord, cette neuvième édition sera sans doute la dernière dans sa forme initiale », renseignait le sympathique festival liégeois avant même son coup d’envoi. Le Micro a vécu et bien vécu ce week-end. Sous le cagnard et en trois temps. Quatre même avec sa foire du disque dominicale et son concours international de chaises musicales. Parlons d’abord du décor. Si le Micro a toujours fait attention à sa déco, l’Oasis a cette année des allures d’havre de paix et d’espace bien être en matériaux de récup. Forêt tropicale, faux bambous et vrais brumisateurs… Ici, on se rafraichit sous le crachin, boit des Granitas alcoolisés et par un passage dérobé se glisse dans une mini boîte de nuit. Couilles à facettes, spots en bacs de bière… C’est vite crowdy (l’espérance de vie à l’intérieur est d’un quart d’heure) mais ça danse à genoux, couché, assis. Il a dû s’y passer des choses.

Au Micro, on a le goût de l’aventure et le sens de la découverte. C’est même pour ça que le badaud y vient. Son côté Kinder Surprise. Nick Drake tunisien, Ennio Morricone anversois… Jeudi, en début de soirée, petit apéritif avant le plat de résistance The Notwist, Jawhar et Condor Gruppe invitent au voyage. Grands espaces d’Afrique du nord, BO’s fantasmées de western spaghetti et de films italiens seventies… Plus efficace que Ryanair. Les microfestivaliers débarquent à leur aise (c’est pas encore week-end) pour le plus grand ambassadeur de l’indietronique teutonne… En dix disques et quasiment 30 ans, The Notwist est devenu l’un des plus illustres représentants du rock indépendant européen. Mutant de ses débuts punk à une krautpop soignée et complexe au gré des humeurs de Markus Acher. Quoi Neon Golden, c’était en 2002 (coup de vieux)? Du bien bel ouvrage quand même…

Si les photos de Ronquières et ses 42000 spectateurs en deux jours font un peu peine à voir cramés et entassés sous un soleil de plomb, au Micro (2000 visiteurs quotidiens à la grosse louche), on respire. Se dépêche de boire sa pinte (tiède, c’est vraiment pas bon la bière bio, même fraîche à un moment d’ailleurs). Et découvre des disques au casque. Parce que la découverte, c’est aussi le truc de Hiss & Pop. Trois passionnés qui ont créé un Vinyle Club et t’envoient mensuellement chez toi pour 28 euros par mois (le vinyle est cher messieurs dames) un disque à découvrir comme le Shamanaid des intrigants My Baby (www.hissnpop.com)…

Et les concerts dans tout ça? On retiendra celui de Snapped Ankles (les chevilles bousillées, un hommage à Misery). Planqués sous leurs peaux de bêtes, les Londoniens électro bricolo tapent sur des bouts de bois, appellent les esprits et parlent avec les arbres. Leur kraut électronique africanisé fait forniquer Can avec Konono dans une transe imbibée. Idéal après les punks à synthé de Bayacomputer et de Komplikations. Puis aussi les revenants de No Age désormais soutenus par le label Drag City. No Age rappelle au bon souvenir du Smell. Ce club de Los Angeles qui il y a dix ans avait accouché d’Health, Abe Vigoda et toute la scène DIY un peu bruitiste californienne. La formule (guitare/batterie) est éculée mais ces deux-là ont gardé la fougue de leurs 20 ans. Pogos et secouage de barrière Nadar. Le rock n’est pas encore tout à fait mort… On en aurait encore confirmation le lendemain avec la fougue des Mystery Lights et le carton des Limiñanas. Portés par l’increvable Mike Brandon (un frontman comme on n’en fait plus), les protégés chevelus et rockeurs du label soul Daptone ont à nouveau prouvé qu’ils étaient plus forts sur scène que sur disque. Nerveux, offensif… Le vintage n’a pas la cote que dans les magasins de meubles. Sans la tripotée de guests qui a participé à la fabrication de leur dernier disque (Emmanuelle Seigner, Anton Newcombe, Peter Hook…) mais bien encadrés par leurs potes de Perpignan, Lionel et Marie Limiñana ont donné un concert d’enfer. Les guitares crachent. Les guitares claquent. On s’en prend encore davantage dans la gueule que lorsque le couple perpignanais jouait à Paris avec tous ses ronflants invités. Dimanche résiste même à l’absence de l’inimitable Bertrand Belin…

Le Micro, ça a aussi été l’électro pop sombre et kitsch de Flavien Berger, le virage électronique de Jacco Gardner (mouai), la fête de famille syrienne du claviériste d’Omar Souleyman. Puis quartier urbain et populaire oblige, la rencontre de Germain. Un voisin de 80 balais (sans doute un peu marseillais) qui vit sur le pas de sa porte, écoute Jerry Lee Lewis, a fait cinq guerres, parle 18 langues, est champion de jiu-jitsu et a décoré sa baraque à la gloire d’Elvis. Ici ou là, promis on reviendra…

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