Critique | Musique

Le retour en grâce de Slowdive

Slowdive © MATTHEW EISMAN
Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Groupe-phare de l’indie rock anglais, Slowdive signe un come-back retentissant, mettant fin à un silence discographique long de 22 ans! Shoegaze’s not dead…

Dans le recyclage permanent des musiques, certains retours surprennent plus que d’autres. La rétromania a pu raviver la deep house, relancer le grunge, ranimer le disco, ressusciter le punk, replumer le post-punk, etc., on ne s’attendait pas forcément à ce qu’elle remette le shoegaze à l’honneur… Peut-être est-ce parce qu’on l’a vécu en direct, mais rarement un mouvement musical n’avait paru autant lié à son époque. Pour rappel, au début des années 90, le shoegaze prolongeait la mélancolie d’une certaine new wave à coups de guitares distordues. Noyées dans le mur du son, les voix racontaient de loin les états d’âme de jeunes gens indie romantiques, enfermés dans leur musique, « intègres » au point de négliger tout jeu de scène, le regard baissé, les yeux braqués sur leur paire de chaussures (shoegaze, donc). Et leurs pédales d’effets…. Le mouvement, essentiellement britannique, ne dura que quelques années: le grunge et la vague Britpop ont rapidement pris le relais. Son culte pourtant persistera et ses accents les plus éthérés alimenteront abondamment ce qu’on appellera la dream pop.

En 2013, cependant, l’impossible arriva. Vingt-deux ans (!) après Loveless, disque-phare du mouvement (élu récemment « meilleur album shoegaze de tous les temps » par le webzine Pitchfork), Kevin Shields et son groupe My Bloody Valentine sortaient un nouvel album, leur troisième. Sobrement intitulé m b v, il montrait qu’il était possible de rester fidèle à son esthétique de départ, sans forcément rabâcher. Un exploit dans un business où les reformations d’anciennes gloires ont toujours ressemblé davantage à des coups qu’à de réelles renaissances artistiques.

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Hic et nunc

L’histoire de Slowdive est à peu près identique. Contemporain de My Bloody Valentine (et de Ride, autre groupe emblématique du shoegaze anglais, qui fait également son retour ce printemps), il avait débranché les pédales fuzz au milieu des années 90. Entre-temps, il y avait bien eu le projet Mojave 3, rassemblant la plupart de ses membres, mais qui s’éloignait des élans soniques de Souvlaki, l’album emblématique de Slowdive sorti en 1994. Il a fallu attendre 2014 pour que Neil Halstead et ses camarades se retrouvent. Une reformation actée par un concert au festival Primavera de Barcelone, et qui est donc aujourd’hui confirmée par un album éponyme, qui arrive, lui aussi, 22 ans après Pygmalion.

Slowdive semble reprendre le fil de la conversation là où il l’avait laissé, presque comme si de rien n’était. La fougue électrique d’Everyone Knows, la longue rêverie de Slomo en intro, les voix qui se noient dans la lave sonique de Star Roving, etc., tout ici est référencé, mais rien ne sonne réellement daté. Cela doit être une question de pertinence et de justesse. Jamais Slowdive ne cherche à être quelqu’un d’autre. Et en l’assumant, il réussit à se donner sinon une urgence, en tout cas une consistance. à défaut de se projeter dans le futur, Slowdive s’invente ainsi un présent. Et c’est déjà beaucoup.

Slowdive, « Slowdive », distribué par Dead Oceans ***(*)

En concert le 07/10 au Botanique, Bruxelles.

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