Baxter Dury: « Le Brexit? Putain. On est une île. Je ne vois pas la différence »

Baxter Dury © Tom Beard
Julien Broquet
Julien Broquet Journaliste musique et télé

Son nouvel album Prince of Tears sous le bras, Baxter Dury parle d’écriture, de Sleaford Mods, de son album à venir avec Étienne de Crécy et d’un Londres de plus en plus craignos.

Le 27 octobre, alors que sortait pour ses 40 ans dans une version super deluxe le New Boots and Panties!! de Ian, son défunt paternel, disque sur la pochette duquel il posait les mains dans les poches, Baxter Dury dévoilait Prince of Tears (lire la critique): cinquième album marqué par sa séparation, le featuring de Jason Williamson, la visite d’une Pipette et la présence de violons. Crevé mais relax, le dandy dégingandé se raconte en grignotant bruyamment.

C’est compliqué à écrire un album de séparation?

Il y a un peu de ça mais Prince of Tears n’en est pas vraiment un. Transformer une déception amoureuse en business, c’est plutôt pas mal pour la surmonter. Ça dépendra du succès du disque au final… Avec les cordes, j’ai voulu amener un certain impact, j’imagine. Moins provincial et plus cinématographique. C’était incroyable de voir 30 personnes donner vie à ce que j’avais imaginé. Il n’y a pas vraiment de grand mystère dans l’écriture. C’est juste quelque chose que je fais tous les jours. Ça prend du temps. Il faut être patient avant de voir une forme qui se dessine. C’est un processus très ennuyeux. Il faut aussi pouvoir attendre que les chansons soient assez bonnes. Puis trouver le fric pour leur enregistrement. Parce qu’il y a une question de business dans tout ça évidemment. Tout est difficile à financer. Pias est super, mais c’est une entreprise qui essaie de protéger ses investissements. Tu dois négocier avec ces gens. Et ça n’est pas spécialement évident. La mise en boîte non plus. Parce que je sais ce que je veux maintenant. J’ai moins joué au couillon. Je suis vraiment bon et je tiens à ce que les gens le sachent. Je ne veux plus être le mec qui rate le bus.

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Pour la chanson Almond Milk, tu as embauché Jason Williamson de Sleaford Mods…

On avait prévu qu’il participe au disque. Une célébration de notre amitié. Je voulais quelqu’un pour qui je ne devrais pas écrire de texte. Il est venu à la maison. Ça a été très vite. On a donné quelques interviews ensemble. Il est cool. C’est un chouette mec qui fait de la musique bizarre et qui rencontre du succès. Je suis content pour lui. C’est réconfortant d’avoir quelqu’un d’autre dans les parages qui fasse un truc étrange et que ça marche. Il vient même de remporter un Q Award.

Sleaford Mods incarne une Angleterre de la musique qui n’hésite pas à ouvrir sa gueule…

Ça se réveille. Je peux comprendre pourquoi. De manière générale, nos petites vies confortables ont été un peu secouées ces derniers temps. Des événements étranges sont survenus. Moi, je suis totalement apolitique musicalement parlant. Ce sont deux choses qui ne sont pas liées chez moi. C’est une question de rapport émotionnel à la musique. Je suis de gauche mais je suis quelqu’un d’assez égoïste. Et il y a beaucoup de choses sur lesquelles tu peux écrire ce que tu veux sans que ça change quoi que ce soit. Puis ces choses sont-elles toujours aussi importantes qu’on le dit? Le Brexit. Putain. On est une île. On est toujours restés à la livre… Je ne vois pas la différence. On persécute les étrangers, mais ça on le faisait déjà… Corbyn? Allez, ce n’est pas Che Guevara. Tu vois ce que je veux dire? Je l’aime bien, il est pur, mais je ne pense pas qu’il sera notre sauveur.

Baxter Dury:

La pochette de ton album a un petit côté La Mort aux trousses d’Hitchcock.

On est partis dans le désert, au Maroc, sept jours. On a fait beaucoup de photos. Ce n’était pas vraiment des vacances. On a mis 18 heures pour arriver là-bas. C’est ce que voulait le photographe. Et pourquoi pas? C’est près de l’Algérie, au nord. L’idée, c’était de ressembler à un mauvais film des années 80. Avec un costume blanc, comme un détective. J’ai porté ce costard pendant une semaine. Je ne l’ai jamais retiré. C’était vraiment dégueulasse. Je te dis pas l’odeur.

Tu fais toujours preuve de pas mal d’humour. Qu’est-ce qui te fait rire?

Je ne sais pas trop. On est des gens drôles en Angleterre. Personnellement, je pense qu’on est les plus drôles. On a de la musique plutôt bonne, on a des acteurs plutôt bons, mais on est définitivement les plus marrants. Les Allemands doivent se trouver rigolos évidemment, mais on sait tous qu’ils ne le sont pas. Quand tu grandis à Londres, tu dois être au taquet, être compétitif dans l’humour. C’est une partie de notre culture. Soit dit en passant, Londres devient extrêmement sombre et dur ces derniers temps. Pour venir ici ce matin, dans le taxi jusqu’à l’Eurostar, le chauffeur s’est pris la tête avec un motard. Le mec s’est planté au milieu de la rue juste devant la voiture. Et le conducteur lui gueulait dessus: ne cherche pas la bagarre, ne cherche pas la bagarre… Je me suis demandé ce qu’il allait faire. J’avais un train à prendre. Il était 8 heures du mat. Mais ça arrive toute la journée. Quelque chose change. Je dirais depuis quatre ou cinq ans. Les gouvernements conservateurs ont fortement diminué la présence policière. Il y a un gros problème de gangs aussi. Ils balancent de l’acide dans les yeux des gens. Tout le temps, partout dans la ville. Tu n’es plus en sécurité nulle part. C’est un peu comme New York dans les années 80. Il y a des endroits violents à Bruxelles aussi. Mais c’est contenu. C’est comme un ghetto. J’ai vu une bagarre ici un jour. C’était dur. Notre ingé son est un expert en karaté. Je suis resté caché derrière lui… Enfin, t’es sans doute plus attentif à tout ça quand tu vieillis.

Tu en es où avec Étienne de Crécy?

On a fait un album ensemble, on l’a presque fini. On cherche un deal pour l’instant. C’est vraiment cool. Genre hip-hop eighties. Ça ne prend pas du tout la direction de la chanson que nous avions enregistrée ensemble pour son album. Ça ressemble à du Mute, je trouve. Assez dingue. On s’est lancé dans cette aventure avec une fille. Elle fait partie de Skinny Girl Diet, un groupe punk féministe londonien sérieux et rêche. Je ne sais pas encore quand le disque sortira mais on compte bien le défendre sur scène.

Le 06/03 à l’Aéronef (Lille) et le 08/03 au Botanique (Bruxelles).

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