Le marché de l’art, quand la culture devient commerce

Brafa 2017 © TD
Tom Denis Stagiaire

La BRAFA 2017 s’est achevée ce dimanche à Bruxelles. Elle réunissait 132 antiquaires et galeristes originaires de 16 pays. C’est ainsi que le milieu de l’art européen s’est réuni dans l’enceinte de Tour & Taxis pour célébrer l’art marchand. Un marché qui fonctionne et où investir n’est pas une mauvaise idée.

Les tentacules de la mondialisation ont, depuis longtemps, agrippé le monde de l’art. La foire des antiquaires de Bruxelles en est une preuve de plus. Les marchands d’art viennent exposer des oeuvres pour les vendre. « Nous examinons chaque nouvelle candidature sous l’angle du professionnalisme du candidat et de la qualité de son offre« , explique Harold T’Kint de Roodenbeke, galeriste et organisateur de la Brafa. Comme toutes les foires, l’endroit propose ainsi la rencontre des acheteurs avec le produit, ici, des créations artistiques.

En pénétrant dans le « stand » 27 c, difficile de ne pas remarquer Le Cirque de Chagall. À côté, dans une petite pièce créée pour l’occasion, sont présentés quelques tableaux signés Paul Delvaux. En face, une toile de Calder assume fièrement ses couleurs vives. Et ainsi de suite, dans toutes les allées… Sur les murs, des centaines de milliers d’euros de marchandise prête à être vendue.

Selon Artprice, la vente d’oeuvres contemporaines a enregistré 1,5 milliard de dollars de recettes entre juin 2015 et juin 2016. 55.000 oeuvres de ces artistes nés après 1945 ont changé de propriétaire lors de ventes publiques. Le secteur se porte en effet très bien. Depuis 2000, le marché de l’art a progressé de 1.370%.

Avant c’était un jury académique qui reconnaissait la valeur – artistique – d’une oeuvre. Aujourd’hui c’est le marché. Les toiles voyagent et changent de main rapidement. Plus la cote de l’artiste est élevée, plus ses oeuvres auront tendance à se vendre cher.

Toutefois, l’art ne ressemble pas à la bourse. Il se base sur l’oeuvre dans son caractère inédit et sur la cote de l’artiste. Contrairement à ce que l’on peut penser, ce qui fait la cote d’un artiste ne réside pas souvent dans des critères esthétiques. Le prix de vente d’un tableau varie plutôt en fonction de la technique utilisée, des dimensions de la toile, de l’expérience et la notoriété de l’auteur. Cette notoriété est calculée en fonction du nombre d’expositions personnelles et collectives de l’artiste ainsi que par le nombre d’articles de presse et de livres le concernant. Mais un peintre est le seul à décider du prix de ses productions. En d’autres termes, c’est lui-même qui détermine sa cote. Parfois des mécènes achètent un grand nombre de toiles d’un même artiste à un prix élevé pour que sa cote décolle. On appelle cela la spéculation du marché de l’art.

« Les femmes d’Alger (Version ‘O’) » de Pablo Picasso pendant une démonstration à Hong Kong. Sa valeur est de 161,1 m$. © REUTERS

L’art marchand possède plusieurs marchés. Le premier est celui des tableaux vendus dans les grands magasins ou dans certaines galeries. Ils répondent à une demande de décoration standardisée. Un acheteur se rend dans une galerie pour acquérir une toile afin de décorer sa maison. L’artiste est en général rémunéré au nombre de points. Un point correspond à un centimètre carré. Ce marché porte le nom légèrement péjoratif du marché des croûtes. Le second, plus noble, est appelé marché des amateurs d’art. C’est l’endroit où interviennent les spécialistes, les grands collectionneurs et les conservateurs de musée. Leur demande n’est plus de décoration, ils veulent de l’art. Un autre marché se nourrit du dernier pour exister: le spéculatif. C’est là où l’art devient intéressant pour ceux qui investissent à long terme. Un marchand ou un collectionneur peuvent décider de faire l’achat d’une collection entière d’un artiste en espérant que sa valeur augmente. Il n’hésitera pas à faire de la pub et à exposer ses oeuvres dans plusieurs galeries pour que la cote de l’artiste s’envole.

À côté des artistes contemporains et de ce marché spéculatif existe le marché de prestige. Ici, ce sont les noms des grands maitres de la peinture qui font la loi. C’est l’art avec un grand A. Des peintures sont parties pour des sommes incroyables. Le tableau Quand te maries-tu? de Paul Gauguin a été vendu à un investisseur qatari à 300 millions de $, ce qui fait d’elle l’oeuvre la plus chère au monde.

Quand te maries-tu? Paul Gauguin
Quand te maries-tu? Paul Gauguin© Dr

Mais comme toute économie qui rapporte, l’art marchand subit aussi ses propres problèmes. Par exemple, les vols et les fouilles illégales sont souvent pratiqués dans les zones de conflits. Selon l’organisateur de la Brafa, le milieu de l’art a trouvé la parade: « dans le cas de pièces volées, il est totalement impossible de les écouler sur le marché légal, car ces pièces sont connues, ont été publiées ou apparaissent dans les registres d’organismes internationaux tels l’Art Loss Register, elles sont donc très facilement traçables et identifiables« .

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