Baroque et barré: Elzo Durt commente cinq oeuvres récentes

© © Elzo Durt
Michel Verlinden
Michel Verlinden Journaliste

C’est une évidence: en matière d’impact visuel, difficile de faire plus percutant qu’Elzo Durt. Sa patte acide, ses images psyché et sa palette criarde sont reconnaissables entre mille. Né à Bruxelles en 1980, ce graphiste et illustrateur a toujours habité les marges de la création. C’est à Recyclart, lieu pilote sous la gare Bruxelles-Chapelle, que tout a commencé pour lui. Durt y réalise son travail de fin d’études dans le cadre de son cursus à l’Erg. « J’avais l’idée de rassembler toutes les images et les sons de la contre-culture bruxelloise », explique-t-il en tirant frénétiquement sur sa cigarette électronique. Le projet de compilation underground ne se concrétisant pas, Elzo Durt décide à la place de prendre les commandes de l’endroit pour une semaine. L’alliance entre Recyclart et Durt est scellée. Au fil du temps, elle revêtira des formes distinctes, entre galerie d’art, direction artistique, création graphique et organisation de soirées.

Cette expérience, couplée aux images propagandistes de sa militante de mère et le souvenir fondateur des pochettes de disque de son père, va forger son style, totalement libre, iconoclaste et appropriationniste. Libre? Il le confie: « Depuis le début, je ne fais que des travaux qui me plaisent. Je n’ai jamais eu de patron, ni d’équipe, je travaille dans mon coin et ça me va bien ». L’argent ne change rien à l’affaire, « le nombre de boulots que j’ai réalisés sans être rétribué est considérable, je pratique souvent le troc, si possible des albums de musique… De toute façon, je n’ai pas besoin de grand-chose. » Une dernière affirmation que souligne le tout petit appartement, trou de nez chargé jusqu’à la garde, qu’il partage avec sa femme et son fils. Iconoclaste? Durt l’est définitivement, ne serait-ce que parce qu’il s’est fait un nom « sans même savoir dessiner » et qu’il n’a pas son pareil pour détourner les images. Ces détournements amènent tout naturellement à se pencher sur l’appropriationnisme qui le caractérise sans doute plus que tout.

Les différentes périodes de son travail -quinze ans déjà sur lesquels reviennent une exposition à la galerie du jour d’agnès b. à Paris ainsi qu’une magnifique somme que publie le label de musique français Born Bad Records à l’occasion de ses dix ans- sont clairement marquées par le type de matières premières visuelles qu’il glane, en grande partie chez Pêle-Mêle. « Vieilles bandes dessinées merdiques, gravures, cartes postales, documents anciens, vieux magazines… ce que je fais, c’est redonner vie aux images avec une souris et un scanner », synthétise ce fou de musique dont la main tremblante trahit la fébrilité. La fébrilité des grands écorchés.

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